Comment as-tu eu l’idée de créer Stone Snowboards ?
Avec ma femme, fin d’hiver 2015 nous allions rentrer de Crans Montana sur Perpignan pour accueillir notre premier enfant. Rentrer pour rentrer ne m’intéressait pas, il me fallait rebondir ! J’avais toujours envie d’enseigner le snowboard mais pas que. Avec mon ami Christophe Defrance qui surfait sur la vague de la vente en ligne dans le paddle, nous avions une idée, on discutait souvent, puis comme toute personne passionnée, on s’est dit qu’on allait se lancer dans l’aventure de créer une marque en ligne de snowboards & splitboards. La veille mon chien « Stone » est décédé. En l’espace de quelques heures c’était fait, restait plus qu’à y réfléchir sérieusement. Au bout de 6 mois Chris a quitté Stone car de son côté l’aventure RedwoodPaddle lui prenait beaucoup de temps & pour ma part j’avais bien compris que rapidement Stone ne serait pas qu’un divertissement, mais réellement une marque à développer car la demande était exponentielle.
Comment as-tu commencé et avec quels moyens ?
Dès le début on ne s’est pas cantonné à faire seulement une planche avec un shape comme peuvent faire certaines personnes qui se lancent ! Directement on a créé nos propres moules, avec des shapes uniques, du freestyle au freeride en n’oubliant surtout pas le splitboard.
On n’a pas commencé avec des investisseurs mais avec toutes les économies en banque ! On ne peut pas se lancer comme ça, il faut avoir de l’expérience & face à la concurrence qui est rude il faut avoir le cerveau qui tourne jour & nuit. Le snowboard n’est pas un marché en plein essor, au contraire. Je suis persuadé que la vie est un éternel recommencement…. Mais dans la vie, on fait des paris. Stone est le plus beau de ma vie. Je ne suis pas un bon joueur de poker, je n’y joue jamais, je fais beaucoup mieux du snowboard ! En gros c’est un peu carte sur table à chaque saison, c’est comme jongler entre un corona virus & un hiver ou il fera chaud ! ou pas. Être fabriquant & vendre en ligne exclusivement c’est anticiper la demande contrairement à un représentant qui va faire le tour des magasins pour leur montrer la marchandise de l’année d’après sur papier ! C’est assez excitant de voir qu’il y a maintenant des stoners aux USA, Japon, Russie..
Est-ce que Stone propose des splitboards depuis le départ ?
Dès le départ on a eu 3 splitboards au catalogue ! Cet hiver on en aura 8 avec 8 moules différents ! Il sera difficile de dire que chez Stone on ne trouve pas de splitboard à son pied ! On a multiplié les tailles & le volume.
Quelles ont été les principales évolutions de la gamme splitboard et quels sont les projets ?
Quand on commence quelque chose on tâtonne ! En 2015, on a travaillé dans une usine approximative ! Il faut appeler un chat un chat ! Je suis toujours transparent & c’est la raison pour laquelle les gens me contactent. Je ne cache rien. Cette usine avait de gros problèmes, on l’a vite compris ! Dieu merci on nous a invité à la quitter & nous avons trouvé une usine en Europe avec qui nous parlons la même langue. Je m’efforce à vouloir rester en Europe car la qualité est primordiale. En termes de construction on a bien évolué car il est important que le matériel soit léger & robuste. C’est du consommable certes mais faut pas prendre les gens pour des pigeons. Il y a quelques mois nous avons été subventionnés par la BPI pour de la R&D pour développer nos propres clips & hooks qui seront sur nos splitboards cet hiver.. mais aussi nos propres fixations de splitboard qui verrons le jour dès l’hiver 21/22. Merci à la CCI d’avoir cru en notre projet, il est certain que nous allons en développer d’autres. Vu le contexte actuel, le splitboard me semble être l’alternative. L’essence même de ce sport est la liberté. Pour faire du splitboard il faut sortir des sentiers battus… Faire la queue au tire fesse est assez simple & rébarbatif. Gravir un sommet qu’on voit depuis toujours de son télésiège préféré est un beau défi !
Stone propose des tarifs particulièrement bas, pourquoi ?
Tout simplement parce que nous vendons en ligne. Il n’y a pas d’intermédiaire. Plus il y a d’intermédiaire plus le produit est cher. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il sera nettement plus solide ou quoi qu’est ce !
J’ai tourné une petite vidéo « Middle Man » qui explique bien le fonctionnement de Stone. C’est certain, nous n’avons pas le même budget communication qu’une grosse marque car nous mettons tout dans l’investissement de moules, la qualité Européenne des boards & les riders qui représentent. Faut pas le dire mais notre objectif est de faire revenir les papas snowboardeurs qui se sont mis au ski car les enfants en font ! ahah.
Est-ce que le milieu a bien accueilli cette nouvelle marque et cette méthode de distribution ?
Ceux qui me connaissent savent que j’ai du caractère, un brin provocateur mais c’est ma manière de voir qui j’ai en face ! J’ai appris le snowboard en 1990, on écoutait du punk, on n’a pas commencé en 2005 ou la mode c’était le bandana & la chaine en plaqué or à base de mauvais shred. Stone est arrivé & de suite on s’est fait des amis ! On s’est fait virer de notre première usine.. « C’est eux ou c’est nous qui partons »… on nous a interdit de salons « mais ils vendent pas en magasin blabla », on nous a mis la pression ! Mais maintenant on a montré patte blanche, ils sont contents & nous aussi ! On n’a rien contre eux ! Au contraire ils nous inspirent.
Les marques proposent de plus en plus de produits “éco responsable”, comment se positionne Stone là dessus et comment vois tu l’avenir ?
Je tanne mon usine à ce sujet, chaque année j’en discute. Il semblerait que l’usine avance à ce sujet. C’est un sujet qui me tient à cœur même si certains mentent. L’industrie du ski/snowboard n’est pas si eco que ça ! Ça farte ?
Je n’aime pas le fait de faire payer les gens plus cher un produit sous prétexte que c’est Eco ! ou Bio ! Quoi de plus normal que de bien manger ou bien rider au juste prix ! Des marques en font tout un blabla, il n’y a pas besoin de forcer. Le marketing tue la planète à ce sujet. Je pense qu’une marque responsable n’en fait pas tout un plat. Je croise les doigts dès l’hiver prochain pour que mon usine soit encore plus propre que ce qu’elle est déjà. Je rigole quand je vois des marques qui fabriquent dans mon ancienne usine communiquent sur « eco ».. Quand je suis allé la visiter, j’étais choqué par leur manière de faire ! Un peu comme un abattoir qui ne respecte pas les règles. On vit dans un monde de pas vu, pas pris… Je suis naïf, je pensais que le confinement aurait laissé des traces.
Si on ne fait pas confiance aux magazines, comment peut-on essayer les boards Stone ?
Nous serons sur des tests à Val Thorens le 21 & 22 Novembre 2020, au Rock On Snow d’Avoriaz le 11, 12 & 13 Décembre 2020. Tous les splitboards seront aussi à tester en pack complet, avec nos propres peaux & bâtons carbone 3 parties. On va faire un « Stone Splitboard Center » dans les Pyrénées, on va aussi essayer de mettre en place un système de location de splitboard à la semaine ou au week-end par chez nous.
La team Stone commence à être bien fournie, des splitboardeurs ?
Hugo Serra monte sur le Freeride World Tour avec son pro model sur la Natural 5. Il fait beaucoup de splitboard au Canada. Jean Louis Saint Arneault vient d’intégrer le Team, c’est un peu la machine du spot de la Grave. Sans compter les freestylers du team, cet hiver ça va envoyer. On recherche un tueur en splitboard polyvalent si jamais contactez-nous !
Es-tu tout seul à gérer la marque ?
Je suis tout seul à gérer Stone, ça interpelle du monde c’est vrai ! Je réponds au téléphone, je développe les moules, j’expédie, je vais sur les salons, je mets à jour le site, détoure les photos & j’en passe ! De la moindre vis sur mesure jusqu’à la bonne taille d’un carton ! J’essaie de m’entourer des bonnes personnes pour prendre les bonnes décisions. Faut bien dormir la nuit ! J’ai quand même un bon team qui a l’œil. L’image est importante. J’avoue, je suis un peu psycho rigide, perfectionniste. J’aime bien les défis. Je pense que d’ici peu de temps je vais devoir embaucher car seul, je dors Stone, je vis Stone, je mange Stone… J’ai commencé dans un garage, là je suis dans un petit bureau de 19 m2, je respire à peine sous le stock mais c’est cosy, je suis comme un lendemain de cuite dans ma couette devant mon 27 pouces, sauf que je suis au bureau & que chaque fois que j’allume la lumière je suis le plus heureux car ce que je fais, je le fais à fond, avec le cœur en me disant toujours, si Stone devait s’arrêter, je n’aurai rien à regretter !
Comment t’organises tu pour proposer une gamme presque aussi fournie que des fabricants bien plus gros ?
Je ne me pose pas de trop de questions, je fonce en tant qu’outsider ! J’essaie de me mettre à la place du rider que j’ai été ! Je fais les choses pour me faire plaisir & je crois que ça se ressent. Entreprendre n’est pas simple, mais si ça l’était tout le monde le ferait !! Les erreurs que je fais me servent pour la saison d’après ! j’ai perdu mes parents il y a 15 ans, c’est peut-être grâce à ça que je suis devenu solide dans mes démarches. Tout ce que je fais je le fais pour eux, ma femme, mes enfants et tous les Stoners.